L’été 2025 restera dans les mémoires comme l’un des plus meurtriers de ces dernières années sur le littoral, dans les rivières et les piscines françaises. Selon Santé publique France, plus de 1 000 noyades ont été recensées entre le 1ᵉʳ juin et le 13 août, dont 268 mortelles.

Derrière ces chiffres terribles se cachent des vies brisées et des familles endeuillées. Pour le SNPMNS (Syndicat National Professionnels des Maitres-Nageurs Sauveteurs), ce bilan n’est pas une fatalité : il révèle surtout un manque criant de prévention, de moyens humains et de volonté politique sur l’apprentissage de la nage.

🌡️ La canicule, un révélateur des carences

Les vagues de chaleur de juin et juillet ont provoqué un afflux massif de baigneurs vers les plages, rivières et plans d’eau. Pourtant, la plupart de ces lieux ne bénéficiaient pas de surveillance adaptée. Résultat : 315 noyades, dont 86 mortelles, pendant la seule période de canicule.
Le SNPMNS le répète depuis des années : l’absence de surveillance dans de nombreux sites est un facteur aggravant majeur. Laisser des familles s’exposer sans dispositif de sécurité, c’est jouer à la roulette russe avec des vies humaines.

🌊 Un déficit d’apprentissage et une culture aquatique défaillante

La France accuse un retard inquiétant dans l’apprentissage de la natation. Trop d’enfants sortent de l’école primaire sans savoir nager correctement. Cela constitue un risque majeur de noyade, en particulier lorsqu’ils se retrouvent en mer ou en rivière.
De plus, il existe un manque de culture du milieu naturel : beaucoup de baigneurs ignorent la puissance des courants, les variations de marées, les dangers des fonds mouvants ou encore la différence entre une baignade en piscine et une immersion en mer ou en lac.
Ce déficit de connaissances expose directement les usagers à des comportements à risque. L’éducation aquatique doit inclure non seulement l’apprentissage technique de la nage, mais aussi la sensibilisation aux spécificités des milieux naturels.

🚫 Le plan « aisance aquatique » : une réponse insuffisante et inadaptée

Lancé par l’Éducation nationale et le ministère des Sports, le plan dit « aisance aquatique » avait pour ambition de familiariser les enfants avec le milieu aquatique dès le plus jeune âge.
Sur le papier, l’objectif est louable. Mais sur le terrain, le SNPMNS dénonce une mesure cosmétique, inefficace face aux enjeux de sécurité aquatique.

Un plan au rabais

  • Le dispositif se limite Ă  quelques sĂ©ances de familiarisation avec l’eau, souvent organisĂ©es en urgence avant les vacances d’étĂ©.
  • Il ne garantit ni un apprentissage structurĂ© de la natation, ni une progression rĂ©elle des compĂ©tences.
  • Les cycles sont trop courts et dĂ©pendent fortement de la disponibilitĂ© des piscines, ce qui accentue les inĂ©galitĂ©s territoriales.

Un manque d’encadrement qualifié

Trop souvent, ces séances sont encadrées par des enseignants peu formés, voire des bénévoles, et non par des maîtres-nageurs sauveteurs diplômés. Résultat : les enfants apprennent à « barboter », mais pas à se sauver en cas de chute accidentelle dans l’eau.

Un décalage avec la réalité des noyades

L’aisance aquatique, telle qu’elle est pratiquée, ne prépare pas les enfants aux dangers concrets : courants de rivières, baïnes, vagues, fonds glissants ou encore immersion involontaire.
Savoir « se sentir bien » dans l’eau ne suffit pas à éviter la noyade. Il faut apprendre à se maintenir à la surface, à se déplacer efficacement et à identifier les risques naturels.

Une illusion de sécurité

En promouvant ce plan comme une grande avancée, les pouvoirs publics entretiennent une illusion de sécurité. Les familles croient leurs enfants préparés, alors qu’ils ne le sont pas. C’est une fausse promesse dangereuse.

🎓 L’Éducation nationale : un maillon faible dans l’apprentissage de la natation

Chaque année, l’Éducation nationale affirme que la natation fait partie des priorités scolaires. Dans les faits, des milliers d’enfants sortent encore de l’école primaire sans savoir nager correctement. Cette carence constitue un risque direct de noyade et une faillite du système éducatif.

Un manque de temps et de moyens

  • Les heures de natation prĂ©vues dans les programmes sont insuffisantes et trop souvent rĂ©duites en raison de contraintes logistiques (dĂ©placements, coĂ»t des crĂ©neaux piscines, manque de personnel).
  • De nombreuses Ă©coles rurales ou pĂ©riurbaines n’ont pas accès Ă  des bassins, et aucune alternative rĂ©elle n’est proposĂ©e aux enfants concernĂ©s.
  • Les enseignants, souvent livrĂ©s Ă  eux-mĂŞmes, ne disposent pas toujours de l’accompagnement nĂ©cessaire par des professionnels qualifiĂ©s.

Des inégalités sociales criantes

Selon l’endroit où l’on naît, l’accès à l’apprentissage de la natation varie du simple au triple. Certains élèves bénéficient de plusieurs cycles complets en piscine, tandis que d’autres n’ont qu’une poignée de séances, voire aucune. Cette inégalité territoriale creuse un fossé qui se traduit, chaque été, par des drames évitables.

👶 Des enfants parmi les premières victimes

Le constat est insupportable : 37 enfants et adolescents ont perdu la vie cet été, soit 9 de plus que l’an dernier. Les noyades de mineurs se sont multipliées en rivières et plans d’eau, souvent dépourvus de surveillance.
Chaque été, les professionnels alertent sur le danger d’un relâchement de vigilance, mais aussi sur le manque d’éducation au risque aquatique. Or, les campagnes de prévention restent insuffisantes et trop ponctuelles.

🌊 Des zones à haut risque ignorées

La mer, avec ses courants imprévisibles, a vu le nombre de noyades mortelles grimper de 40 % par rapport à 2024. Certaines régions, comme la Normandie, affichent des taux de mortalité alarmants, proches de 45 % des accidents recensés.
Ces chiffres confirment ce que nous dénonçons : les moyens alloués à la surveillance sont inadaptés, les recrutements de maîtres-nageurs sauveteurs sont insuffisants, et les collectivités locales peinent à assumer leurs responsabilités.

✊ Ce que réclame le SNPMNS

Face à ce drame récurrent, le SNPMNS appelle l’État et les collectivités à :

  • Renforcer massivement les effectifs de maĂ®tres-nageurs sauveteurs, en revalorisant nos mĂ©tiers et en rendant attractives les formations et le dĂ©roulement de carrière ;
  • GĂ©nĂ©raliser l’apprentissage de la natation et de la prĂ©vention des noyades dès le plus jeune âge par des maĂ®tres-nageurs sauveteurs et non les professeurs des Ă©coles, avec un vĂ©ritable plan national ;
  • IntĂ©grer une Ă©ducation au milieu naturel dans les programmes (mer, lac, rivière) afin que les Ă©lèves comprennent les risques concrets et adoptent les bons comportements.
  • Assurer l’égalitĂ© d’accès en construisant ou rĂ©novant des bassins, notamment dans les territoires ruraux ou dĂ©favorisĂ©s.
  • Le classement de l’activitĂ© natation en environnement spĂ©cifique, dans le code du sport

📢 Un drame évitable

Les noyades ne sont pas une fatalité. Elles sont le reflet d’un manque d’anticipation et de moyens. Le SNPMNS continuera à se mobiliser pour que la sécurité des baigneurs devienne enfin une priorité nationale.
Nous ne pouvons accepter qu’en 2025, dans un pays comme la France, des vies soient encore perdues faute de prévention et de surveillance suffisante.

La sécurité aquatique doit être considérée comme une mission de santé publique, pas comme une variable budgétaire.